Présentation du Global Labour Institute (GLI, Septembre 2013)

Définition
Le Global Labour Institute (GLI) est une fondation de droit suisse dont le siège est à Genève.
Son objectif est de promouvoir la solidarité internationale entre les organisations syndicales et entre celles-ci et les autres organisations et institutions de la société civile afin d’établir une société mondiale démocratique et durable, basée sur les principes de justice sociale, de liberté et de l’état de droit.
Le GLI est une organisation de services au mouvement syndical. Il est guidé par les valeurs et principes du socialisme démocratique.Le défi
La globalisation de l’économie mondiale au cours des vingt dernières années a créé une économie sans frontières globalement intégrée dans laquelle le capital et le pouvoir transnational ont de façon croissante dicté leur loi aux gouvernements nationaux et aux Parlements, aux partis politiques et aux organisations syndicales nationales, c’est à dire à tous les instruments de contrôle démocratique qui opèrent au niveau national.

La principale conséquence sociale de la globalisation de l’économie mondiale a été l’émergence d’un marché du travail global, qui subit fortement l’influence de la violence étatique sous ses différentes formes, une des prérogatives de l’état à ne pas avoir décliné. Ainsi, le plus petit dénominateur commun du marché du travail est artificiellement maintenu au niveau le plus bas, celui du quasi esclavage, ce qui signifie en conséquence que les conditions de la concurrence mondiale deviennent à terme incompatibles avec la survie d’un ordre politique démocratique capable de répondre aux besoins humains fondamentaux.

Face à cette nouvelle donne historique, le mouvement syndical doit apprendre à suivre de nouvelles règles — différentes de celles qui prévalaient dans le cadre de l’état nation dans lequel il exerçait traditionnellement son influence. Il doit apprendre à penser et à agir globalement. Il doit rassembler ses ressources, dispersées en une multitude d’organisations et d’institutions, de manière à se concentrer sur un but unique et primordial: faire pencher la balance du pouvoir global en sa faveur.

Le GLI sera un vecteur et un catalyseur de ce processus. Ses liens étroits avec le mouvement syndical international, ainsi que son statut indépendant, lui permettront de contribuer à connecter ce qui est déconnecté, à réunir ce qui est désuni, à organiser ce qui est désorganisé. Son cadre de références est la culture démocratique internationale et les principes de la démocratie représentative, qui se sont développés au sein du mouvement syndical au cours de l’histoire et qui en ont fait la seule force organisée démocratiquement de la société civile.

Les enjeux
La globalisation, sous sa forme actuelle, a placé les anciennes questions de luttes sociales et politiques dans un contexte nouveau et a exacerbé les souffrances humaines comme jamais auparavant. La société mondiale est à nouveau confrontée à la barbarie, au mépris des valeurs universelles sur lesquelles s’est construit le consensus d’après-guerre. Les luttes pour répondre à ces questions sont étroitement liées et sont toutes des facettes d’une même lutte et d’une même question: Quelle sera la société dans laquelle nous vivrons dans vingt ans?

Pouvoir: Au cours des vingt dernières années, les transnationales ont énormément accru leur pouvoir au détriment de l’état nation. Les accords commerciaux internationaux et les politiques sociales et économiques, y compris les privatisations massives et les programmes d’ajustement structurel, imposés par les institutions de Bretton Woods à des gouvernements qui ne sont pas en mesure de refuser les conditions qu’on leur impose, ont transféré l’autorité de gouvernements qui ont à rendre compte à leurs citoyens à des transnationales qui n’ont de comptes à rendre qu’à leurs actionnaires. Un gouvernement mondial virtuel est apparu, appuyé par un consensus des gouvernements conservateurs des principaux États qui contrôlent l’essentiel du pouvoir économique, politique et militaire, et en fin de compte piloté par le pouvoir transnational. Ce gouvernement mondial n’est en fait soumis à aucune forme de contrôle ou de responsabilité démocratique. La responsabilité démocratique du capital international et la démocratisation de la gestion globale sont les questions fondamentales du 21e siècle.

Argent: Les politiques néolibérales menées de façon délibérée et provocatrice par les gouvernements conservateurs ont polarisé la société. Les richesses créées par le travail sont systématiquement redistribuées au bénéfice des riches et au détriment des pauvres. Il faut remonter au début de ce siècle pour retrouver des inégalités sociales aussi marquées. Les emplois à bas salaires et la précarisation de l’emploi se généralisent par le biais du travail temporaire, de la délocalisation et de la sous-traitance, et des emplois temporaires et à temps partiel. Occuper un emploi ne signifie même plus être protégé contre la pauvreté, et le chômage croit parallèlement à un secteur informel déjà important dans lequel les travailleurs n’ont aucun droit et ne bénéficient d’aucune protection.

Exploitation et oppression: #à l’aube du second millénaire, le travail des enfants est plus répandu que jamais, les ateliers clandestins sont réapparus alors qu’ils avaient été fermés grâce à des luttes syndicales victorieuses, des millions de travailleurs sans droits se déplacent d’un continent à l’autre dans l’espoir de trouver une survie économique — et parfois physique — et des dictatures tiennent des peuples entiers en esclavage. La lutte contre l’exploitation et l’oppression est étroitement liée à la lutte pour les droits humains et démocratiques et nécessite des alliances entre les organisations syndicales, les mouvements de défense des droits de la personne et autres mouvements de défense des peuples indigènes et des minorités religieuses, nationales ou culturelles.

Démocratie industrielle: même dans les pays où la démocratie prévaut, elle s’arrête souvent sur le seuil du lieu de travail. La crainte de devoir céder son emploi à la masse croissante des chômeurs permet de maintenir des relations et des structures autoritaires sur le lieu de travail. Lorsque les salariés ont pu obtenir un certain degré d’influence sur leur travail et sur son orientation, ces acquis sont remis en cause comme étant autant de “rigidités” qui doivent être abolies au nom de la concurrence. Les syndicats doivent démontrer que la démocratie est indivisible, et que la démocratie industrielle n’est pas principalement une question industrielle, mais une question démocratique, au niveau de l’entreprise et au niveau global.

Droits de la personne: pour le mouvement syndical, la lutte pour les droits humains et démocratiques n’est pas seulement une obligation morale, mais une question de classe fondamentale. Le but est de porter cette lutte au-delà des droits syndicaux fondamentaux, telles que la liberté d’association, la liberté d’expression et le droit de grève, y compris le droit de faire grève par solidarité, de manière à obtenir, en alliance avec d’autres forces progressistes, la démocratisation de la société mondiale et la défaite des bastions actuels du travail forcé et des forces réactionnaires.

Égalité: malgré une certaine prise de conscience et des luttes impressionnantes, les femmes ont été les principales victimes de la déréglementation, de la précarisation et du darwinisme social. Elles composent la majorité des chômeurs, des travailleurs agricoles et des employés de maison immigrés. Elles sont les victimes des formes les plus brutales et destructrices de l’exploitation. La justice pour les femmes, et leur égalité professionnelle et sociale, nécessitent non seulement des alliances entre les syndicats et les mouvements féministes, mais également la féminisation du mouvement syndical, c’est-à-dire l’arrivée massive de travailleuses dans les syndicats à tous les niveaux, jusqu’aux postes de direction. Ce n’est qu’en modifiant cet aspect de son héritage culturel que le mouvement syndical parviendra à être pleinement représentatif et à obtenir un pouvoir qui lui permette de remplir son mandat.

Écologie: aucune réponse globale efficace à la destruction de l’environnement n’a encore été trouvée. Des combats locaux ont été en partie victorieux. Les législations nationales sont souvent considérées par les transnationales comme un obstacle au profit et une raison pour délocaliser la production vers des pays où il n’existe aucune législation protectrice. Une politique globale générale de protection de l’environnement nécessite l’émergence d’un ordre mondial alternatif mis en place par les efforts conjoints des organisations syndicales, des partis politiques et des groupes de protection de l’environnement.

Guerre: bien que la Guerre froide ait pris fin et que les blocs qui la menaient se soient en grande partie désintégrés, plusieurs pays d’Afrique, d’Asie et d’Europe sont ravagés par la guerre et des conflits militaires menacent dans d’autres pays où une paix incertaine prévaut encore. Les grandes puissances sont indifférentes aux guerres qui ne menacent pas directement leurs intérêts. Le nationalisme extrémiste et exclusif, l’intégrisme religieux, des formes nouvelles et anciennes de fascisme prennent de l’ampleur. Ils sont les ennemis mortels du mouvement syndical qui doit devenir le moteur d’une alliance démocratique contre l’extrémisme de droite et la guerre.

Les statuts du GLI stipulent que ses objectifs, outre la construction de la solidarité syndicale, sont de combattre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, d’élargir le pouvoir de décision du peuple sur son destin, de promouvoir les droits démocratiques, de soutenir les populations dans leur lutte pour l’autodétermination et la liberté d’expression de leur culture nationale, de promouvoir l’égalité entre hommes et femmes, de combattre toutes formes de discrimination et de lutter pour une paix durable basée sur la liberté pour tous.

Les tâches
Le GLI agira à plusieurs niveaux:

Histoire: “Ceux qui se coupent de leurs racines ne peuvent croître”. Le GLI renforcera l’identité du mouvement syndical et le sens de sa mission en sauvant l’histoire du mouvement syndical de l’oubli et en la mettant à disposition du mouvement en tant qu’outil de syndicalisation. Le GLI entreprendra des recherches et fera paraître des publications sur l’histoire du mouvement syndical en partenariat avec des SPI et d’autres organisations syndicales et portera une attention particulière aux projets destinés à restaurer la mémoire historique du mouvement syndical dans les pays où il a été sévèrement réprimé, tels que par exemple les pays de l’Europe centrale et de l’Est et les États issus de l’ex-URSS.

Programme: les éléments d’un programme pour un nouvel ordre mondial démocratique existent: par exemple, les différentes propositions en vue de l’introduction d’une clause sociale dans les accords commerciaux et sociaux internationaux, ou de la taxation des mouvements internationaux de capitaux. De nombreux livres et articles proposent également une analyse critique du «nouvel ordre mondial» capitaliste actuel. Il n’existe en revanche peu de propositions pour des alternatives cohérentes dans divers domaines (économique, social, politique, culturel, écologique, etc.), et qui pourraient représenter toutes ensemble une alternative globale. Ce programme doit encore être élaboré. Le GLI participera à l’élaboration d’un programme pour une société alternative en coopération avec des institutions et des mouvements oeuvrant déjà dans ce sens. Ce programme émergera de discussions parmi un vaste éventail d’organisations et d’institutions, y compris les interlocuteurs sociaux prêts à coopérer avec le mouvement syndical et d’autres partenaires afin de mettre en place une société mondiale démocratique et durable.

Organisation: bien qu’il soit évident que les structures actuelles du mouvement syndical, en particulier au niveau international, ne sont pas à même de répondre aux défis de la globalisation, il est moins évident de voir de quelle manière elles doivent être modifiées. Une réponse efficace à la globalisation nécessite des organisations syndicales internationales plus fortes. La globalisation de l’économie mondiale appelle la mise en place d’un système global de relations industrielles, à partir des accords existants entre les SPI et les transnationales. Au sein du mouvement syndical global, les relations des syndicats aux partis et à l’action politique fait l’objet d’un débat. La syndicalisation du secteur informel représente un défi considérable. Le GLI fournira un forum dans lequel de telles questions pourront être étudiées et discutées sans pour autant contraindre les organisations à des engagements directs.

Alliances: selon les questions abordées, le GLI cherchera à faciliter des alliances et des réseaux entre les syndicats et les partenaires potentiels de la société civile, comme par exemple les organisations des droits de la personne, de l’éducation, des droits des femmes, de la protection de l’environnement, les mouvements sociaux des démunis ruraux et du secteur informel urbain, les mouvements d’étudiants progressistes, les organisations communautaires, les associations de consommateurs et d’autres.

Les moyens
Éducation: Le GLI définira des besoins éducationnels et mènera des activités d’éducation en partenariat avec des organisations syndicales internationales, la FIAET et ses membres, ou avec des organisations de services spécialisées. Dès que les ressources le permettront, le GLI organisera une université d’été pour le mouvement syndical international. D’autres projets envisagés sont : la création d’une université syndicale internationale; des camps de jeunesse/séminaires; une bibliothèque internationale de prêt d’ouvrages sur le syndicalisme; l’évaluation du potentiel des technologies de l’informations pour les syndicats.

Recherches: Le GLI mènera des recherches sur diverses questions correspondant aux tâches décrites ci-dessus.

Publications: Le GLI fera paraître des brochures et d’autres publications, par lui même ou sous contrat et en partenariat avec d’autres organisations syndicales, notamment du matériel d’éducation, des textes informatifs destinés au grand public, des études et des rapports sur des questions spécifiques.

Réunions: le GLI organisera différentes réunions (réunions informelles, séminaires, conférences) correspondant aux tâches décrites ci-dessus.

Réseaux: le GLI établira des liens avec des institutions qui mènent des activités similaires ou proches de manière à développer les possibilités de synergie; il fera partie d’un réseau (ou au besoin contribuera à en créer un) de syndicalistes, d’auteurs, de journalistes et de militants politiques concernés par les mêmes questions; il participera à des initiatives syndicales allant dans le même sens. Le but de ces activités est de contribuer à un effort collectif de développement d’un plan d’action qui réponde aux objectifs économiques, sociaux et politiques du mouvement syndical et de ses alliés.

Financement
Le GLI est financé par des contributions régulières, par des donations, par des subventions versées par des organismes publics ou des institutions, par le revenu provenant des services rendus par son personnel à des tierces parties, par la vente de ses publications et par les revenus de ses actifs.
Son instance dirigeante, le Comité de Fondation, décide quelles sources de revenus peuvent être acceptées et de quelle manière les fonds disponibles seront utilisés.

Le Conseil de Fondation
Le Conseil de Fondation, qui peut comprendre jusqu’à treize membres, est composé de: Alana Dave, responsable de l’éducation, ITF; Romain Felli, chercheur UNIL; Dan Gallin, président; Joëlle Kuntz, journaliste; Ron Oswald, secrétaire général de l’UITA; Karin Pape, consultante pour l’Europe du WIEGO; Vasco Pedrina, vice-président, IBB; David Spooner, Global Labour Institute (UK), Sean Sweeney, directeur, Cornell Global Labor Institute; Rebekka Wyler, conseillère municipale PS, Zurich.

Global Labour Institute
Avenue du Cardinal Mermillod 18
CH-1227 Carouge (Genève)
tel/fax: (+41 22) 344 63 63
courriel: gli@bluewin.ch